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Sensibilité aux AINS

Demandez à l’Expert de septembre 2015

R: Pour répondre à la question, nous devons passer en revue les différents types d’anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) et les réactions de sensibilité.

Les AINS sont couramment utilisés pour soulager la douleur et l’inflammation. Ils sont disponibles en vente libre et sur ordonnance. Cependant, environ 2% de la population développera une sensibilité aux AINS.1 Cette sensibilité se manifeste par des réactions allergiques, telles que bronchospasme, urticaire / œdème de quincke et anaphylaxie, qui peuvent ou non être dépendantes de l’immunoglobuline E (gE).La sensibilité aux AINS 2-4 est plus fréquente chez les patients asthmatiques. Environ 20% des patients asthmatiques seront sensibles à l’aspirine ou aux AINS, les femmes étant 2,5 fois plus susceptibles d’être touchées.4

Physiopathologie des réactions

Les AINS exercent leur mécanisme d’action en inhibant la cyclo-oxygénase (COX), une enzyme clé responsable de la biosynthèse des prostanoïdes, y compris les prostaglandines.5,6 Les AINS non sélectifs inhibent à la fois la COX-1 et la COX-2. L’isoforme COX-1 est constamment exprimée dans les tissus et régule la protection de la muqueuse gastrique, l’activation plaquettaire et la fonction rénale.7 On pense que l’inhibition de la COX-1 est en grande partie responsable de certains des effets indésirables (EI) associés aux AINS, y compris la plupart des réactions de sensibilité. En revanche, l’inhibition de l’isoforme COX-2 est principalement responsable des effets anti-inflammatoires des AINS.

Comme indiqué, la majorité des réactions de sensibilité seraient dues à l’inhibition de la COX-1, ce qui entraîne une diminution des taux de prostaglandine E2 et une augmentation des taux de leucotriènes.2,4 Moins de prostaglandine E2 inhibe la libération normale d’histamine par les mastocytes. L’augmentation des leucotriènes peut provoquer une bronchoconstriction et une augmentation de la production de mucus, entraînant des symptômes respiratoires de sensibilité aux AINS. Les leucotriènes peuvent également être responsables d’autres réactions courantes à l’aspirine et aux AINS, en particulier l’urticaire et l’œdème de quincke.4

Considérations relatives au médicament (COX-1 vs COX-2 Sélectif)

Pour déterminer au mieux l’AINS le plus sûr, le clinicien doit d’abord faire la différence entre les effets indésirables possibles des AINS, tels que les maux d’estomac, et les réactions de sensibilité (par exemple, respiratoires, dermatologiques).2 Cela peut être fait en prenant des antécédents médicaux soigneux. Une fois qu’une réaction a été déterminée comme étant une réaction de sensibilité, le clinicien doit déterminer si le patient est allergique à tous les AINS ou à un seul type d’AINS.

Le tableau 1 liste les AINS selon leur sensibilité à la COX-1 et à la COX-2.8,9 Pour déterminer la réactivité croisée des AINS, les cliniciens peuvent effectuer un défi médicamenteux par voie orale en exposant le patient à un AINS différent de celui lié à la réaction de sensibilité. Le patient reçoit une fraction de la dose complète, en titrant toutes les heures et en évaluant la réaction jusqu’à ce qu’une dose complète soit administrée.

Les réactions respiratoires à l’aspirine commencent dans les 2 à 3 heures; l’urticaire survient généralement dans les 4 heures (jusqu’à 24 h), mais elle peut survenir aussi rapidement que 15 minutes après l’administration.3 Si aucune réaction ne se produit dans les 3 à 4 heures, cet AINS est probablement sûr à utiliser. En cas de réactivité, un inhibiteur sélectif de la COX-2, tel que le célécoxib (Celebrex), peut être testé. Si le patient réagit à l’inhibiteur de la COX-2, tous les AINS doivent être évités.10 Les patients ayant des antécédents d’asthme ou d’urticaire chronique devraient avoir leur condition primaire sous contrôle avant de subir un défi AINS, car les patients atteints de ces maladies sont plus enclins à la réactivité croisée.3

Une analyse rétrospective a soigneusement exposé des patients présentant des antécédents d’hypersensibilité aux AINS (présentant une urticaire, un œdème de quincke et des symptômes respiratoires) au célécoxib et au méloxicam (Mobic, autres). L’asthme était présent dans 27% de la population. Parmi les patients ayant reçu 200 mg de célécoxib, 4 patients sur 78 ont eu une réaction positive (5,1%); parmi ceux ayant reçu 7,5 mg de méloxicam, 11 patients sur 112 (9,8%) ont réagi.11 L’étude a révélé que les réactions allergiques au célécoxib et au méloxicam étaient relativement rares — 94,9% et 90%.2% des patients, respectivement, ont toléré ces médicaments. Dans une autre étude, les enquêteurs ont testé des patients qui avaient une sensibilité antérieure aux AINS avec du méloxicam à 15 mg; 49 des 51 patients (96%) étaient capables de tolérer le méloxicam.12

L’acétaminophène (Tylenol, autres) est généralement une alternative sûre chez les patients sensibles aux AINS; cependant, chaque dose doit être inférieure à 1 000 mg pour prévenir l’inhibition de la COX-1. Le médicament a une activité analgésique et antipyrétique, et ses effets ont été notés similaires à ceux de l’aspirine.5 L’acétaminophène exerce son mécanisme d’action via une ou plusieurs voies du système nerveux central.13 Ces mécanismes proposés comprennent une voie sérotoninergique, une voie centrale de COX-3 et une voie médiée par les cannabinoïdes. Il a une faible inhibition des isoformes de COX-1 et de COX-2, ce qui le distingue des AINS. Les effets antipyrétiques de l’acétaminophène sont attribués à l’inhibition de l’activité du centre de régulation de la chaleur hypothalamique.7

Les patients sensibles à l’aspirine, en particulier les patients atteints d’une maladie respiratoire exacerbée par l’aspirine (DERA), doivent éviter des doses supérieures à 1 000 mg d’acétaminophène.1,3 Les patients atteints d’AERD peuvent être traités par des inhibiteurs de la COX-2 après administration d’une dose d’essai dans le cabinet d’un médecin. Une autre option pour les patients gravement sensibles à l’aspirine et aux AINS est la désensibilisation à l’aspirine. Ceci n’est recommandé que lorsque les cliniciens planifient une utilisation à long terme de l’aspirine, comme pour la prophylaxie des événements cardiaques, car des doses quotidiennes doivent être administrées pour préserver la désensibilisation.1,2

Comme indiqué, le célécoxib est toléré par la plupart des patients présentant une urticaire, un œdème de Quincke et/ ou des symptômes respiratoires dus à l’aspirine ou aux AINS, seuls quelques-uns présentant des réactions cutanées.3,11 Bien que le célécoxib soit un traitement potentiellement sûr pour la douleur chez les patients sensibles, son utilisation à long terme est déconseillée en raison des risques accrus d’événements thrombotiques (par exemple, accident vasculaire cérébral, embolie pulmonaire, crise cardiaque), et la prudence doit être de mise chez les patients ayant des antécédents de maladie cardiovasculaire.1,14 Le Célécoxib ne doit pas être utilisé chez les patients présentant la triade d’aspirine (asthme, polypes nasaux et sensibilité à l’aspirine); cependant, si un patient le souhaite, le médicament peut être testé avec la première dose complète administrée dans un cadre médical où un traitement peut être administré en cas de réaction.1,2,11

Si un patient présente une véritable allergie médiée par lesgE à un AINS particulier, les autres AINS ne sont pas susceptibles d’avoir la même réaction, mais la confirmation d’une véritable réponse immunologique est difficile.2 Les AINS ayant la même classification structurale chimique doivent être évités car il existe une réactivité croisée élevée entre des groupes similaires.1,4 Par exemple, le diclofénac et le kétorolac (Sprix, autres) sont des acides acétiques hétéroaryliques; l’indométacine (Indocine, autres), le sulindac et l’étodolac (Lodine, autres) sont des acides acétiques indoliques; et l’ibuprofène (Advil, Motrine, autres), le naproxène (Naprosyn, Aleve autres) et le kétoprofène sont des acides arylpropioniques.

Conclusion

La réponse à la question du lecteur est oui, avec quelques réserves. Si les patients ont besoin d’un soulagement de la douleur ou de l’inflammation non opioïdes, n’excluez pas tous les AINS en raison d’antécédents de sensibilité à un médicament de cette classe. Si le patient a eu une anaphylaxie sévère à un médicament, n’initiez pas ce médicament ou un médicament du même groupe chimique. Un autre inhibiteur de la COX-1 peut être testé et, en cas d’échec, un inhibiteur de la COX-2 peut fonctionner. Assurez-vous d’administrer l’AINS aux patients sensibles dans un endroit où une réaction peut être contrôlée. Les patients atteints d’AER sous-jacent ou d’urticaire chronique ne doivent pas recevoir d’aspirine ou d’inhibiteur de la COX-1, mais peuvent essayer les inhibiteurs de la COX-2 pour une utilisation aiguë si les maladies sous-jacentes sont contrôlées. Le méloxicam et l’acétaminophène inhibent la COX-1 à fortes doses et peuvent réagir de manière croisée chez les patients sensibles, mais sont des options à faibles doses. Il est important de peser les risques et les avantages avec les patients pour aider à faire le choix clinique approprié qui convient le mieux à chaque patient.

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