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Les troubles de l’humeur tels que la dépression sont plus fréquents chez les femmes, en particulier chez les femmes enceintes. Certaines études basées sur la population rapportent une prévalence de dépression de 20% chez les femmes enceintes., Compte tenu de cette prévalence relativement élevée, l’utilisation d’antidépresseurs pendant la grossesse n’est pas rare. Une étude menée aux États-Unis a rapporté qu’au moins 10% des femmes enceintes utilisaient des antidépresseurs pendant la grossesse. Cependant, les antidépresseurs peuvent interférer avec la croissance fœtale, il y a donc un débat en cours sur la nécessité d’utiliser ou non des antidépresseurs pendant la grossesse.

Comme tous les médicaments, les antidépresseurs doivent être utilisés avec prudence pendant la grossesse. L’utilisation d’antidépresseurs pendant la grossesse a été liée à divers résultats négatifs, notamment une fausse couche, une naissance avant terme et un faible poids à la naissance. Une étude a révélé que dans les deux semaines suivant la naissance, les nouveau-nés de mères ayant utilisé des antidépresseurs pendant la grossesse étaient plus susceptibles de développer un syndrome d’adaptation néonatale médiocre (RO = 5,07, IC à 95% = 3,25-7.90), une affection caractérisée par un mauvais contrôle de la température, une hypoglycémie, une tachypnée, une détresse respiratoire, une congestion nasale ou une cyanose et des convulsions. Une revue systématique a signalé un risque plus élevé de développer des malformations cardiaques congénitales chez les nouveau-nés de mères ayant pris de la paroxétine pendant la grossesse (RO = 1,36, IC à 95% = 1,08-1,71); cependant, cette étude n’a pas trouvé de preuve d’une association globale entre l’utilisation d’antidépresseurs et les malformations congénitales néonatales.

La dépression non traitée pendant la grossesse a été liée à plus de naissances prématurées et à moins d’allaitement. La dépression pendant la grossesse a également été associée à l’asthme chez les nouveau-nés, et la gravité de la dépression était positivement corrélée à la gravité de l’asthme (une relation dose-réponse). De plus, la détresse vécue par les femmes dépressives enceintes est similaire à celle vécue par les femmes dépressives qui ne sont pas enceintes; la baisse de leur qualité de vie, l’altération de leur fonctionnement social et leur risque de suicide sont les mêmes. Par conséquent, le traitement de la dépression pendant la grossesse est important pour la mère et l’enfant.

Il a été démontré que la psychothérapie, en particulier la psychothérapie interpersonnelle, améliore l’humeur dépressive chez les femmes enceintes. Cependant, cela n’a été étudié que chez les femmes enceintes souffrant de dépression légère à modérée, pas chez celles souffrant de dépression sévère pour lesquelles un traitement antidépresseur peut être nécessaire. À ce jour, il y a eu peu de preuves sur l’efficacité et l’innocuité de l’utilisation d’antidépresseurs pendant la grossesse. Certains experts sont parvenus à un consensus selon lequel les antidépresseurs devraient être utilisés pour traiter la dépression sévère pendant la grossesse. Les lignes directrices cliniques du Réseau canadien pour les traitements de l’humeur et de l’anxiété (CANMAT) pour la prise en charge du trouble dépressif majeur chez l’adulte suggèrent de peser les effets indésirables des antidépresseurs sur le fœtus (qui se produisent à basse fréquence) par rapport aux avantages du traitement. Les lignes directrices énumèrent la fluoxétine et d’autres antidépresseurs sélectifs de recapture de la sérotonine (ISRS) comme antidépresseurs de première intention à utiliser pendant la grossesse, mais elles avertissent également de possibles malformations cardiaques néonatales après l’utilisation de la fluoxétine. Une étude prospective de petit échantillon a comparé les résultats néonatals entre 35 femmes enceintes qui utilisaient des antidépresseurs (principalement des ISRS) et 23 femmes enceintes qui n’en utilisaient pas. Cette étude n’a trouvé aucune différence dans le fonctionnement cognitif, le langage et la mobilité chez les bébés à l’âge de 18 mois. Un autre rapport de cas n’a révélé aucune anomalie dans le développement physique ou mental d’un nourrisson de neuf mois né d’une mère qui avait pris de la duloxétine.

Nous pensons que les avantages du traitement antidépresseur des femmes enceintes souffrant de dépression dépassent le risque possible pour le fœtus: (a) si la dépression est grave (c’est-à-dire avec des idées ou un comportement suicidaires, des symptômes psychotiques ou une perte totale d’appétit), (b) s’il existe des antécédents familiaux de troubles mentaux récurrents, (c) si l’individu manque de soutien familial ou social, ou (d) si une dépression modérée persiste malgré un traitement psychothérapeutique. L’utilisation d’antidépresseurs doit être envisagée pour le traitement des femmes enceintes qui répondent à l’un de ces critères. Les avantages et les inconvénients du traitement antidépresseur doivent être discutés avec les personnes et les membres de leur famille avant d’obtenir leur consentement éclairé.

Actuellement, la plupart des lignes directrices recommandent l’utilisation d’ISRS (par exemple, fluoxétine et citalopram) ou d’antidépresseurs tricycliques (par exemple, nortriptyline) pour la dépression pendant la grossesse. Les psychiatres doivent s’assurer que la femme dépressive et les membres de sa famille sont conscients des risques potentiels et signaler immédiatement tout symptôme connexe. Les psychiatres traitant les femmes enceintes doivent également coordonner leur traitement avec l’obstétricien responsable pour assurer la prévention en temps opportun d’éventuels résultats négatifs.